Un peu de douceur dans un monde de brutes, même si les auteurs que je vais vous présenter ne sont pas réputés pour faire dans la finesse. A titre d'exemples, Charles Bukowski, le clochard poète qui mena une vie faite d'alcool, de sexe et d'écriture; Bret Easton Ellis qui s'amuse à rentrer dans la peau d'un serial killer et qui nous livre un cocktail détonant, et Jay McInerney nous entraîne dans l'univers artificiel des yuppies (frime, drogue, sexe).
Seul Peter Mayle fait un peu figure d'épouvantail dans cette liste, lui qui nous décrit si bien la région du Lubéron à travers des récits humoristiques remplis de chaleur.
Voilà, maintenant vous connaissez le système : cliquez sur une des photos ci-dessous pour accéder aux pages de ces auteurs; la dernière image concernant une petite sélection de livres sympas.
Charles Bukowski fut, dans le désordre, manutentionnaire, clochard, postier, poivrot mais surtout poète et écrivain à ses heures. Menant une vie de misère, il se réfugie dans l'alcool, court les filles et écrit. Auteur d'une quarantaine de livres, adapté au cinéma et traduit en plus de 10 langues, le succès lui permettra enfin de mener une vie tranquille après 50 ans de galère. Buk est très facile à lire, c'est drôle, ça se descend tout seul. Ecrivain culte aux USA grâce à ses lectures-conférences, où saoul à rouler par terre, il commentait son oeuvre, il connut également son heure de gloire en France en ayant foutu un énorme bordel dans l'émission littéraire très respectée "Apostrophes".
Autant le dire clairement, HANK, pour les intimes, n'était pas un écrivain comme les autres. Complètement en marge du système, il n'avait que très peu d'amis dans le milieu littéraire et s'attirait les critiques de nombreux auteurs sur son style de vie. Je vous propose donc de faire un retour sur quelques passages de sa vie de bohème.
Charles
Bukowski est né le 16 août 1920 en Allemagne. En
1922, ses parents et lui quittent ce pays pour Los Angeles afin
de faire fortune. Son père est un homme violent et l'univers
de Charles est restreint : toute sortie lui est formellement interdite.
Pendant l'adolescence, il découvre l'alcool avec un camarade
de classe et ne cessera de boire jusqu'à la fin de sa vie.
Vers 1933, Buk commence à s'intéresser à
l'écriture et se plonge dans la bibliothèque locale.
Il devient un lecteur effrené : D.H.Laurence, Carson Mc
Cullers, Hemingway, John Fante... En 1935, il entre à la
L.A. High School mais rapidement le sort s'acharne sur lui : son
corps se couvre d'acné et il se replit encore plus sur
lui-même. Pendant ces mois de réclusion, il écrit
sa 1ère nouvelle et prend goût à l'écriture
pour son côté solitaire. A 17 ans, il commence à
boire régulièrement avec des copains plus âgés
et lors d'une de ces souleries, il envoie son père au tapis.
Celui-ci ne le touchera plus jamais. Sorti de l'école,
il trouve son premier job dans un grand magasin mais il comprend
très vite que cette vie n'est pas faite pour lui : sacrifier
son temps à des tâches absurdes et supporter l'autorité.
Il est licencié et ce cycle "petit boulot/licencié
rapidos" se répétera jusqu'à son entrée
au service postal. Buk voit son avenir en tant que clochard ou
au mieux écrivain . Il boit de plus en plus et traîne
dans les bars jusqu'à la fermeture. Sa vie est déjà
bien en place : l'alcool, la solitude, les petits boulots.
Buk
a 21 ans et il continue les petits boulots merdiques. Il part
quelques temps à La Nouvelle Orléans mais reviendra
très vite à Los Angeles, chez ses parents. Il écrit
toujours et envoie ses nouvelles à de grands magazines,
sans résultat. Ecrire lui est devenu nécessaire
pour pallier ses vélléités de suicide. Il
part s'installer à New-York mais ne résiste pas
à cette ville. Blues, il s'enfonce et plonge davantage
dans l'alcool. Il n'écrira quasiment plus pendant 10 ans.
Il fait l'ouverture et la fermeture des bars et commence sa longue
déchéance. C'est le fond du fond : il devient clochard.
Vers 1946, il retourne se fixer à L.A. car il s'y sent
chez lui plus qu'ailleurs. Dans un bar, il rencontre Jane Cooney
Baker. Elle même alcoolique, ils vivront ensemble une dizaine
d'années. Il écrit de temps en temps une nouvelle
ou un poème, mais sa principale occupation reste l'alcool
qu'il partage désormais avec Jane. Fin 1952, il entre à
l'administration des postes; il y restera 3 ans. En 1955, Hank
tombe malade. L'hôpital appelle un prêtre mais il
survit. Les médecins lui interdisent l'alcool, promesse
qu'il ne tiendra pas. Après sa sortie d'hôpital,
il démissionne de La Poste et se remet à écrire.
Jane boit de plus en plus et il décide de mettre un terme
à leur relation. Il envoie quelques poèmes à
la revue Harlequin dont la rédactrice en chef se
nomme Barbara Frye. Suit une longue correspondance entre elle
et lui et par jeu, il décide de l'épouser sans jamais
l'avoir rencontrée. Elle fait le chemin jusqu'à
Los Angeles et s'avère être une jolie blonde de 20
ans. Ils se marient à Las Vegas et s'installent chez elle
au Texas. Surprise : le grand-père possède la moitié
de la ville et Buk se laisse doucement entretenir. Mais elle veut
montrer à sa famille qu'ils peuvent s'en sortir seuls et
l'oblige à reprendre le travail. Pendant ce temps, il apprend
le décès de sa mère qui vient d'être
opéré d'un cancer.
En
1958, après 2 ans de mariage, ils divorcent. En décembre,
c'est au tour de son père de décéder. Il
hérite de la maison paternelle qu'il vend et dépense
tout l'argent aux champs de courses, ne voulant rien garder en
souvenir de lui. La même année, il réintègre
les services postaux et y restera douze ans. A 38 ans, seul et
supportant mal son travail, il continue de boire mais s'impose
du temps pour l'écriture. Jane meurt à 49 ans et
Buk la veillera jusqu'à sa mort. Peu à peu, il devient
quelqu'un dans le milieu de la poésie underground. Le 14
octobre, Buk à 40 ans. Cette date célèbre
aussi la sortie de son premier livre. On le pousse déjà
à donner des lectures publiques. Son mythe de poète
poivrot de Los Angeles se construit. Il rencontre Frances Smith,
une fan qui emménage chez lui. Elle tombe enceinte et il
envisage de se remarier (mariage qui n'aura pas lieu). Le 7 septembre
naît Marina Bukowski et son père lui consacre beaucoup
de temps, ne voulant pas faire la même erreur que son paternel.
Son rythme de vie (alcool, travail , courses, écriture)
étouffe sa femme qui part à Washington avec sa fille.
Hank
commence à être connu en Europe, surtout en Allemagne
et en France. En 1967, il publie une chronique hebdomadaire dans
un journal marginal de L.A. et ses textes seront rassemblés
plus tard sous le titre de Journal d'un vieux dégueulasse.
En 1968, il travaille à un premier roman qui restera inachevé.
Au printemps, il donne sa 1ère lecture publique dans une
galerie de Sunset Bd. Buk y va à contre coeur et décide
de se bourrer la gueule avant de monter sur scène. C'est
une révélation : il tient son public en haleine
et déchaîne les foules. Au début de l'année
70, il démissionne du service postal et décide de
vivre de sa plume. Dès le lendemain de sa démission,
il attaque un roman autobiographique (tout comme son oeuvre d'ailleurs)
intitulé Le Postier. 20 jours plus tard, le livre
est terminé.
Buk
a maintenant 50 ans. Il rencontre Linda King, mère de 2
enfants et artiste à ses heures. Une longue histoire, faite
de ruptures et de retrouvailles, commence. Son ancienne femme
et sa fille reviennent s'installer à Los Angeles et Marina
rend visite à son père chaque semaine. Il continue
de donner des lectures, ce qui lui permet de renconter ses admiratrices.
Sa relation avec Linda est toujours aussi orageuse et prend fin
en 1974. Entre temps, il termine son second roman Factotum
qui lui aura pris 2 ans de sa vie. En 1977, un jeune réalisateur,
Barbet Schroeder, souhaite réaliser un film sur la vie
de Hank mais 10 ans s'écouleront avant que le projet n'aboutisse.
Il écrit Women qui résume ses 20 dernières
années à la recherche de femmes. Le 29 septembre,
lors d'une lecture à Los Angeles dans un club, il fait
l'une des rencontres les plus importantes de sa vie : Linda Lee
Beighle, qui deviendra Madame Bukowski jusqu'à la mort
de ce dernier. Linda lui conseille un nouveau style de vie (du
vin à la place de la bière) et lui apporte un certain
équilibre. Il écrit désormais entre 20 et
30 poèmes par semaine. Suite au succès, ses revenus
augmentent et il devient acquéreur d'une maison à
San Pedro, Californie. C'est là qu'il passera les dernières
années de sa vie qui se compose de courses hippiques, d'écriture
et de bouteilles de vin. En octobre de la même année,
il fait un second voyage en Europe, notamment en France pour passer
dans l'émission de Pivot "Apostrophes". Ecoeuré
par l'attitude de Pivot et le côté bourgeois de l'émission,
il déclenche un scandale télévisuel en prenant
une cuite en direct et en effarouchant la romancière Catherine
Paysan. Cette aventure ne fait qu'accroître sa popularité
en France. En 1977, il signe un contrat avec Barbet Schroeder
pour un film dont il sera le scénariste "Barfly".
En
1980, Buk fête ses 60 ans et s'attaque à l'écriture
de Souvenirs d'un pas grand chose, un roman sur les premières
années de sa vie. En 1981, le réalisateur italien
Marco Ferreri porte à l'écran Contes de la folie
ordinaire. Le film est une catastrophe, un navet et bien que
Bukowski n'ai rien à voir avec ce film, il n'en ai pas
moins dépité. Le 18 août 85, après
neuf ans de vie commune, Buk et Linda décident de se marier.
Le projet de film est toujours d'actualité. En 1986, Sean
Penn décide de produire et de jouer Barfly mais
sans Barbet Schroeder. Finalement, cela ne se fera pas et c'est
Mickey Rourke qui jouera le rôle. En février 1987,
commence le tournage du film qui sera bouclé en 34 jours.
Le film est sélectionné à Cannes et Hank
commence l'écriture d'un livre, Hollywood, retraçant
l'histoire du tournage. Le film lui plaît et reçoit
un bon accueil de la part du public grâce notamment aux
deux têtes d'affiche : Mickey Rourke et Faye Dunaway. En
1988, il est atteint de tuberculose et arrête de boire pendant
la durée du traitement, c'est-à-dire plus d'un an.
Pendant cette période, il ne parviendra pas à écrire.
En 1990 sort Le ragoût du septuagénaire et
Neeli Cherkovski publie Hank : la vie de Charles Bukowski dont
s'inspire cette biographie. En même temps, il rédige
un journal qui s'étend jusqu'en 1993 : Le capitaine
est parti déjeuner et les marins se sont emparés
du bâteau. C'est un livre très émouvant
où l'on sent la mort planer. Hank sait qu'il arrive au
terme de sa vie et nous fait part de son sentiment sur la mort.
Il ne tardera d'ailleurs pas à se faire une idée
plus précise sur ce sujet puisque le 9 mars 1994, Charles
Bukowski s'éteint à San Pedro, Californie. Après
une vie de galère et de misère, il goute au repos
éternel. Son épitaphe : DON'T TRY (n'essaie pas).
Charles Bukowski a écrit
une quarantaine de livres mais seulement seize bouquins ont été
traduits en français. Beaucoup de poèmes sont introuvables
et n'ont fait l'objet d'aucune traduction. Ses principaux ouvrages
sont les suivants : Contes de la folie ordinaire - Au sud de
nulle part - Nouveaux contes de la folie ordinaire - Journal d'un
vieux dégueulasse - Hollywood - Le Postier - Factotum
- L'amour est un chien de l'enfer (Tomes I & II) -
Pulp - Women - Souvenirs d'un pas grand chose - Je t'aime, Albert
- Le ragoût du septuagénaire - Le capitaine est parti
déjeuner et les marins se sont emparés du bâteau
- Jouer du piano ivre comme d'un instrument à percussion
jusqu'à ce que les doigts saignent un peu.
Il existe également une biographie de Charles Bukowski écrite par Neeli Cherkovski "Hank : la vie de Charles Bukowski". Pour information personnelle, 3 films ont été adaptés des oeuvres de Bukowski : Barfly (avec Mickey Rourke et Faye Dunaway), Les contes de la folie ordinaire (avec Ben Gazzara et Ornella Muti) et Lune Froide (de et avec Patrick Bouchitey)
(cliquez sur les photos pour les agrandir)
Voici les 2 sites français les plus complets concernant Charles Bukowski :
: http://www.multimania.com/brake/index.shtml
Beat,
Whisky et Poésie,
un site très sympa sur Buk mais aussi d'autres auteurs
tels que Burroughs, Bret Easton Ellis, Kerouac... : http://www.multimania.com/jkerouac/