Voici une petite sélection de livres très différents les uns des autres mais tout aussi intéressants. De Houellebecq à Salinger en passant par Louis Ferdinand Céline, voici quelques auteurs qui méritent d'être lus voir relus.

Ken Grimwood : "Replay"

En ce 18 octobre 1988, Jeff Winston se trouve dans son bureau new-yorkais, et écoute sa femme lui répéter au téléphone : "il nous faut, il nous faut...". Il leur faudrait, bien sûr, un enfant, une maison plus confortable,. Mais surtout parler à coeur ouvert. Sur ce, Jeff meurt d'une crise cardiaque. Il se réveille en 1963, à l'âge de dix-huit ans, dans son ancienne chambre d'université. Va-t-il connaître le même avenir? Non, car ses souvenirs sont intacts. Il sait qui va gagner le prochain Derby, et ce qu'il en sera d'IBM et d'Apple... De quoi devenir l'homme le plus puissant du monde, jusqu'à... sa deuxième mort, et qu'une troisième, puis une quatrième vie commencent... Provocateur et plein d'humour, ce roman qui spécule allégrement sur le temps offre quelques effrayantes réponses à quiconque a jamais rêvé de rejouer sa vie. De quoi refroidir les fantasmes des replayers éventuels.

 

Michel Houellebecq

"Les particules élémentaires"

Michel, chercheur en biologie rigoureusement déterministe, incapable d'aimer, gère le déclin de sa sexualité en se consacrant au travail, à son Monoprix et aux tranquillisants. Une année sabbatique donne à ses découvertes un tour qui bouleversera la face du monde. Bruno, de son côté, s'acharne en une quête désespérée du plaisir sexuel. Un séjour au Lieu du Changement, camping post-soixante-huitard tendance new-age, changera-t-il sa vie? Un soir, dans un jaccuzi, une inconnue à la bouche hardie lui fait entrevoir la possibilité pratique du bonheur. Par leur parcours familial et sentimental chaotique, les deux demi-frères illustrent de manière exemplaire le suicide occidental -à moins qu'ils n'annoncent l'imminence d'une mutation.

"Extension du domaine de la lutte"

"Vendredi soir, j'étais invité à une soirée chez un collègue de travail. On était une bonne trentaine, rien que des cadres moyens âgés de vingt-cinq à quarante ans. A un moment donné, il y a une connasse qui a commencé à se déshabiller. Elle a ôté son tee-shirt, puis son soutien-gorge, puis sa jupe, tout ça en faisant des mines incroyables. Elle a encore tournoyé en petite culotte pendant quelques secondes, et puis elle a commencé à se resaper, ne voyant plus quoi faire d'autre. D'ailleurs, c'est une fille qui ne couche avec personne. Ce qui souligne bien l'absurdité de son comportement". Ainsi débute l'odyssée désenchantée d'un informaticien entre deux âges, peu convaincu de l'intérêt de son métier, jouant toutefois son rôle en observant les mouvements humains et les banalités qui s'échangent autour des machines à café. L'installation d'un progiciel en province lui permettra d'étendre le champ de ses observations, d'anéantir les dernières illusions d'un collègue -obsédé malchanceux- et d'élaborer une théorie complète du libéralisme, qu'il soit économique ou sexuel.

 

J.D. Salinger : "L 'Attrape-coeurs"

Renvoyé de son école, Holden Caulfield, jeune garçon new-yorkais, vagabonde pendant quelques jours dans la grande ville, en proie au mal de vivre. C'est cette brève odyssée que nous raconte J.D. Salinger, jouant en virtuose du langage moderne. Son héros, mélange de tendresse et d'humour, de pudeur et de vulnérabilité, est particulièrement attachant.

 

Amélie Nothomb

"Hygiène de l 'assassin"

Prétextat Tach, quatre-vingt-trois ans, prix Nobel de littérature, n'a plus que deux mois à vivre. Monstre d'obésité et de misanthropie, il joue avec une cruauté cynique à éconduire les journalistes venus l'interviewer. Les quatre premiers fuient épouvantés. La cinquième, Nina, aura raison de lui et de son secret : sous les mots se cachent le crime, et sous l'oeuvre, l'imposture. La littérature, la vraie, est faite de larmes et de sang.

"Les catilinaires"

La solitude à deux, tel était le rêve d'Emile et de Juliette. Une maison au fond des bois pour y finir leurs jours, l'un près de l'autre. Etrangement, cette parfaite thébaide comportait un voisin. Un nommé Palamède Bernardin, qui d'abord est venu se présenter, puis a pris l'habitude de s'incruster chez eux chaque après-midi, de quatre à six heures. Sans dire un mot, ou presque. Et cette présence absurde va peu à peu devenir plus dérangeante pour le couple que toutes les foules du monde... C'est une comédie très noire, d'une lucidité tour à tour drôle et dévastatrice, que nous offre ici la romancière d'Hygiène de l'assassin, révélation littéraire de 1992.

 

Carson McCullers : "La ballade du café triste"

Dans sa vie comme dans son oeuvre, c'est le même besoin effréné d'amour que l'on trouve, la même obsession de cette musique à travers laquelle les êtres croient se réconcilier avec eux-mêmes. Et l'on est frappé surtout par la recherche tenace de contacts humains, réduits aux rencontres de hasard dans les petits bars où l'alcool réchauffe le corps et l'âme, efface la douleur du monde et rend Dieu superflu... Bref soulagement puisque la solitude revient. Cette solitude que Carson McCullers et chacune de ses créatures cherchent à fuir mais qu'elles finissent toutes par choisir, comme un privilège ou un moindre mal. Car, on le sait, il y aura toujours de la solitude pour ceux qui en sont dignes.

Hector Bianciotti

 

Oscar Wilde : "Le portrait de Dorian Gray"

Par la magie d'un voeu, Dorian Gray conserve la grâce et la beauté de la jeunesse. Seul son portrait vieillira. Le jeune dandy s'adonne alors à toutes les expériences, s'enivre de sensations et recherche les plaisirs secrets et raffinés. "Les folies sont les seules choses qu'on ne regrette jamais", "il faut guérir l'âme par les sens, guérir les sens par l'âme". Oscar Wilde voulut libérer l'homme en lui donnant comme modèle l'artiste. Pour se réaliser, il doit rechercher le plaisir et la beauté, sous toutes ses formes, bien ou mal. L'art n'a rien à voir avec la morale. Dans une langue raffinée, l'auteur remet en question la société, le mariage, la morale et l'art. Ses propos sont incisifs et humoristiques. Ce livre scandalisa l'Angleterre victorienne, Oscar Wilde fut mis en prison pour avoir vécu ce qu'il écrivait. Au siècle suivant, Proust, Gide, Montherlant, Malraux ont contribué à la célébrité du génial écrivain.

 

John Fante

"Bandini"

Un sacré bonhomme sans doute que ce Fante-Bandini. Un sacré écrivain aussi. L'Arturo Bandini de Bandini est un gamin criblé de taches de son et couronné d'une tignasse en colère. Un râleur, désolé d'être fils d'une mère passivement amoureuse et bigote et d'un père maçon, violent, incertain et cavaleur. Amoureux d'une étoile filante et indifférente, sa petite camarade de classe à la santé fragile, haï par ses maîtres et pairs, Arturo passe son temps à détruire d'une main ce qu'il a construit de l'autre. Bon et méchant, généreux et voleur, il est à la fois la glace et le feu, la tendresse et la rancoeur.

Michèle Gazier -Télérama-

"Demande à la poussière"

"Que ceux qui aiment Bukowski se précipitent! Voilà du Bukowski du meilleur cru, dans une traduction parfaite, savoureuse et juste à point de Philippe Garnier, dont on ne vantera jamais assez les mérites! A vrai dire, ce n'est pas du Bukowski, mais du John Fante, le type qui a influencé et fait verser des larmes d'admiration à Bukowski. Des histoires de loyer qu'on ne peut pas payer, et de bistrots minables où le café est pire que de l'eau de vaisselle. C'est à Los Angeles. C'est triste, c'est génial, c'est plein d'amour et ça se lit d'une traite. Hautement recommandé".

Rouge

 

Mark Childress : "La tête dans le carton à chapeaux"

Trop, c'est trop! Un jour, Lucille en a eu assez. Vraiment assez des côtes de porc à tous les repas, de la lessive, de la vaisselle, de ses six enfants et surtout de Chester, son plouc de mari, qui se moquait d'elle lorsqu'elle disait qu'elle serait actrice. Alors, elle l'a tué, Chester. Puis elle a coupé la tête avec un couteau électrique et l'a mise dans un Tupperware. Elle a entassé les gosses dans la Ford, les a déposés chez sa mère et elle a filé. Droit vers Hollywood, droit vers sa nouvelle vie avec, allez savoir pourquoi, la tête de Chester sur la banquette arrière... Personnages extravagants, situations cocasses, intrigue endiablée, suspense, humour, émotion. Un remarquable roman récemment adapté au cinéma par Antonio Banderas.

 

Céline : "Voyage au bout de la nuit"

Voyage au bout de la nuit est un roman qui a daté l'histoire de la littérature. Dès sa publication, le scandale et les polémiques soulevés par l'emploi de la langue orale et la dénonciation d'une société abrutissant et humiliant l'homme sont immédiats. Le style surprend autant qu'il effraie, d'autant qu'il s'agit du premier roman d'un illustre inconnu. En 1932, l'introduction de la langue populaire en littérature reste rare et il est encore moins fréquent que ce soit le narrateur qui parle cette langue, d'habitude réservée aux seuls dialogues. Céline frappe fort. Le projet a été longuement mûri, depuis Semmelweis, Progrès ou L'Eglise. Voyage correspond à l'aboutissement et la maturité d'une écriture que son auteur
travaille depuis de nombreuses années. Voyage se divise en deux grandes parties. De façon très simpliste, la première relate les errances et les égarements de Bardamu, le narrateur, à travers le monde et la seconde son retour à Paris et sa carrière de médecin. Céline utilise sans retenue les données de son expérience de soldat et de médecin pour doter sa prose d'un style particulier, qui fera de Voyage un tel chef-d'œuvre. A la simple lecture de l'incipit du roman, on plonge déjà dans l'univers et la langue de Céline.

 

Tyne O'Connell : "Sexe, mensonges & quiproquos"

"Deux femmes, de profession libérale, cherchent une troisième pour partager grand appartement à Nothing Hill. Ouverture d'esprit indispensable. Cette annonce avait été rédigée pour moi : mon ouverture d'esprit est abyssale. Pour Evelyn, jeune avocate originaire de Sidney et installée à Londres, la journée s'annonce difficile. Elle doit prononcer sa plaidoirie, mais elle est en retard, ses talons hauts se coincent dans le bitume, l'ecstasy absorbée la veille n'apporte pas vraiment la sérénité escomptée, et son client est un teigneux spécialiste du coup de boule. Pour couronner le tout, l'avocat général s'avère être l'ancien petit ami d'Evelyn - ce traître immonde qui l'a amenée à prendre en grippe toute la gent masculine. Inutile de chercher un réconfort auprès de Charles et Sam, le couple de lesbiennes dont Evelyn partage l'appartement : obsédées par leur désir d'enfant, elles ne voient plus en leur amie que le moyen de trouver le donneur de sperme idéal... Drôle, tonique, irrévérencieux et tendre, ce roman constitue un remède vigoureux contre les idées toutes faites sur le monde actuel.

 

Virginie Despentes : "Les jolies choses"

Pauline et Claudine sont des soeurs jumelles que tout oppose : Pauline, rebelle, fidèle en amour, refuse le compromis. Fonceuse et paumée à la fois, un peu hardcore, un peu actrice, Claudine aime qu'on la désire. Pourtant, quand elle se suicide, Pauline la soeur ennemie prend sa place. S'enivre d'imposture, de succès et d'illusions. Comment être une femme éprise de vérité dans un monde de mensonges? Qui croit que les purs sont ceux qu'ils prétendent être? Chasse aux dupes de la réussite, jeu des faux semblants, plongée dans le monde frelatée des corps factices qui se vendent entre marketing et cosmétiques, parfois au rayon de la prostitution. Le troisième roman de Virginie Despentes est le portrait à l'acide d'une femme d'aujourd'hui, garce et martyre, mutante et héroïne. Mais l'auteur de Baise-moi va à l'essentiel : dans le regard des hommes, voici Pauline quand elle veut tout à la fois. Tout? la foule et la solitude, la pureté et l'impureté, le sexe et la tendresse.

 

Nick Hornby : "Haute fidélité"

"Un roman hilarant, voilà l'événement ! Il y a de quoi faire dans cette histoire destinée aux individus coincés et mal coincés entre la trentaine et tout ce qui suit. Rob, bientôt trente-six ans, est mal en point : "Qu'ai-je fait de ma vie?" se demande ce sempiternel adolescent qui craint de vieillir (même bien) au lendemain d'une rupture en contemplant les bacs de son magasin de disques pop paumé dans une ruelle de Londres. Pour notre plus grand plaisir, Rob, qui se demande in fine s'il ne serait pas un nul, décide d'entamer la falaise. Il récapitule ses amours, depuis le premier, à douze ans, qui dura trois fois deux heures jusqu'au dernier, une nuit correcte avec une chanteuse américaine et dresse un inventaire hilarant de ses états d'âme. Tous ceux qui considèrent comme vertige nécessaire le fait de savoir à un moment donné faire durer une relation monogame, se délecteront à la lecture de ce roman postmélancolique qui célèbre les vertus du rire".

Catherine Argand -Lire-

 

Patrick Süskind : "Le parfum"

Au XVIIIème siècle vécut en France un homme qui compta parmi les personnages les plus géniaux et les plus horribles de son époque. Il s'appelait Jean-Baptiste Grenouille. Sa naissance, son enfance, furent épouvantables et tout autre que lui n'aurait pas survécu. Mais Grenouille n'avait besoin que d'un minimum de nourriture et de vêtements, et son âme n'avait besoin de rien. Or ce monstre de Grenouille, car il s'agissait bel et bien d'un genre de monstre, avait un don, ou plutôt un nez unique au monde et il entendait bien devenir, même par les moyens les plus atroces, le Dieu tout-puissant de l'univers, car "qui maîtrisait les odeurs, maîtrisait le coeur des hommes". C'est son histoire, abominable... et drolatique, qui nous est racontée dans Le Parfum, un roman qui, dès sa parution, eut un succès extraordinaire et est devenu très vite un best-seller mondial.

 

Herbert Lieberman : "La maison près du marais"

Un couple à la retraite vivant dans une maison isolée, près d'un marais, se prend d'amitié pour un jeune homme, Richard. Celui-ci s'installe chez eux, s'immisçant dans leur vie quotidienne, perturbant insensiblement, très progressivement, l'ordre des choses, et finissant par loger dans un réduit, sous l'escalier. Huit clos terrifiant par le calme trompeur, par l'appréhension vive qu'il dégage, ce livre, de la première veine de l'auteur de Nécropolis, n'est pas seulement un remarquable récit d'épouvante. C'est aussi une belle réflexion sur la haine et l'angoisse, quand les hommes n'en peuvent plus de tenter de les maîtriser.

 

Paul Smaïl : "Vivre me tue"

"Beauté berbère, disait avec les yeux de l'amour Myriam. Mais on ne me la fait pas. Et à un patron moins encore. Les pires sont les directeurs de ressources humaines. Ils vous repèrent tout de suite, ils vous flairent comme des chiens dressés à le faire, ils ont l'oeil. Je ne suis pas une ressource humaine, j'ai trop sale gueule. C'est tout vu". Pour crier sa rage, Paul pourrait choisir la violence mais, nourri de littérature, c'est vers les mots qu'il se tourne, parce que seuls les mots peuvent le sauver de la haine. Jour après jour, il noircit les pages d'un carnet, et raconte Myriam, sa princesse juive, Daniel, le frère qui vit si mal sa condition de beur, les petits boulots, en attendant. En attendant quoi? Interdit d'avenir, il choisit finalement de partir, pour conjurer le sort et aussi parce que Conrad, Melville, Stevenson lui ont soufflé que le salut était peut-être dans l'aventure.

Véritable phénomène de librairie dès sa parution en 1997, ce récit à la première personne du racisme français ordinaire a fait couler beaucoup d'encre. Dans une langue forte, lyrique parfois, juste toujours, il ne laisse personne indifférent.